Cette forme de plongée urbaine se développe. Objectif : prendre confiance en soi et réduire le stress.
Des corps flottent à la surface de l’eau, entourés de surveillants sanglés de gilets jaunes. Bienvenue dans le monde (du silence) des apnéistes. Catégorie « statique » avec un meilleur temps d’immersion réalisé par Benoît (24 ans) en 6’14 ». Dimanche dernier, les meilleurs compétiteurs de la région avaient rendez-vous à Vélizy-Villacoublay (Yvelines) avec l’espoir d’une qualification aux Championnats de France.
Un sport qui reste extrême mais dont la pratique en mode loisir gagne 15 à 20 % d’adeptes chaque année. Chacun y trouve son compte. « Dans l’eau, on n’est pas désavantagé par le poids, et en plus on a moins froid », sourit Denis Pommier, médecin fédéral et lui-même apnéiste.
« Il faut simplement des tympans solides, un cœur et des poumons en bon état » DENIS POMMIER, MEDECIN FEDERAL ET APNEISTE
Longtemps, l’apnée a souffert d’une mauvaise réputation. « Le Grand Bleu a fait du mal à notre sport qui est pourtant une belle école de la maîtrise de soi », constate Jean-Luc, 54 ans, licencié à Neuilly-sur-Seine et PDG d’une filiale de Philips. En 1988, lors de la sortie du film de Besson, Théo, 17 ans, n’était pas né. Il plonge pourtant depuis ses 10 ans dans le sillage de toute sa famille. « Croatie, Thaïlande, Grèce, nos vacances sont choisies en fonction de nos plongées, confie le benjamin du club de Vélizy. Je suis le seul apnéiste de ma bande de copains et on a une petite reconnaissance du fait que ça reste un sport extrême. » « Si les gens suivent les consignes et s’écoutent, il n’y a pas de risques, précise sa mère, Sophie, monitrice d’un groupe d’ados. Mes trois garçons ne savaient pas encore nager qu’ils étaient déjà dans l’eau avec masque, tuba et brassards. Les jeunes apprécient l’apnée car c’est beaucoup moins codifié que la plongée bouteille. » « Il n’y a pas vraiment d’âge minimal, il faut simplement des tympans solides, un cœur et des poumons en bon état », précise le docteur Pommier. En piscine, la pression est moindre qu’en mer, même si elle « devient désagréable vers les 4 m », continue le spécialiste.
Mais les vertus de l’apnée sont nombreuses aussi bien pour le corps que pour l’esprit. Une véritable « bulle d’air » pour les adeptes. « On gère son stress, on travaille sa concentration et on maîtrise ses limites, résume Philippe, 54 ans, qui nage 130 m en monopalme sans respirer. Personnellement, ça m’a aussi permis de soigner mes problèmes de dos. »
Dès l’immersion, le rythme cardiaque ralentit de 20 % et l’entraînement permet de muscler le cœur. « On sort de l’eau dans un état un peu euphorisant, dû autant à l’accumulation de CO2.
qu’à la capacité à se relâcher », ajoute Sophie. On apprend à décoder et maîtriser ses sensations, ce qui contribue à un lâcher-prise dont les effets se prolongent au-delà de la sortie de l’eau. « Ce n’est pas non plus du yoga », précise le médecin, qui constate que les accidents — samba (perte de motricité) ou syncope — sont rarissimes. « Pour assurer la sécurité, on est deux fois plus nombreux hors de l’eau que dans l’eau », conclut-il.